Le Parti Communiste Français doit-il présenter un candidat communiste à l’élection présidentielle de 2022 ?

Option 1 ou Option 2 pour le vote des communistes à la stratégie pour 2022 ?

Octavien de Mehun
19 min readMay 2, 2021

# Le contexte politique en France

Ce n’est pas un mystère que la France vit actuellement une crise politique importante. De multiples évènements ont déjà marqué cette reconfiguration du corps politique français.

Le premier, les résultats de l’élection de la présidentielle de 2017. Macron, le candidat “sans-parti, ni-droite, ni-gauche” a été élu avec les voix des élites intellectuelle et économique (qui est un fait d’analyse politique en soit). Il a été suivi de prêt par 2 candidats anti-système. Le Pen, la candidate du Rassemblement nationaliste, revendiquée populiste-patriote. Mélenchon, le candidat d’un nouveau mouvement, agglomérant nombre de partis et tendances de gauche anti-libérale et écologiste. Des anciens clivages gauche/droite (PS/UMP), seul Fillon en a été rescapé sans pour autant réussir à se qualifier pour le second tour. Enfin, pas tout à fait car Fillon représente une tendance ultra-conservatrice de la droite parlementaire qui n’était pas celle de ces derniers candidats (Chirac ou Sarkozy). Bref, les élections présidentielles et legislatives de 2017 ont rebattu les cartes et à voir la composition de l’assemblée nationale élue, les têtes se sont renouvelés. Mais, le “dégagisme” exprimé par les citoyens a été rapidement balayé par les nouveaux élus marcheurs qui ont montré, que l’on peut changer les têtes, les idées reste. Cet écart entre la volonté d’un renouvellement des politiques, pour quelque chose de plus “moderne” que le peuple a exprimé et les actes de la majorité, dans la continuité de la réforme néolibéral, est selon moi ce qui a entraîné l’autre grand évènement de ces dernières années, le mouvement des gilets jaunes.

Le mouvement des gilets jaunes, est ce type de mouvement dont on sent l’emergence mais dont on ne mesure pas encore l’ampleur ou la finalité. Apparu un an et demi seulement après l’élection du nouveau pouvoir macronien, sur une décision qui, me semble-t-il, est une moindre attaque contre le prolétariat qui peut être la reforme du code du travail de 2017, il est le mouvement de tout un peuple muet en colère. Le vêtement fluo et les rond-points, lieu visible du quotidien par excellence, est un choix parfait pour redonné une voix d’ampleur pour les revendications de ce peuple des “périphéries” et du déclassement. Même si, contrairement a ce qui a pu se passer quelques années auparavant en Italie, le mouvement n’a pas créé de parti et/ou un nouvel electorat homogène, ces revendications auront infusé dans les classes populaires et moyenne tout en faisant peur à une bourgeoisie, ne sachant que répondre que la force de l’état.

C’est mon troisième évènements, celui de l’emergence de la police comme une force politique. D’un côté, les violences policières, dénoncées par beaucoup déjà (notamment depuis la mort de Rémi Fraisse) durant les mandats de Sarkozy et de Hollande est devenue visible, plus uniquement par les citoyens des banlieues, mais par tous les citoyens. La dénonciation des violences policières est devenu une revendication politique appuyant le fait qu’il existe un clivage droite/gauche. A droite, on soutient la police car fasse au mécontentement grandissant de la population, elle est devenue le seul rempart pour la conservation de ce système injuste. Les syndicats de police, puissantes organisations au sein de l’institution policière, lassés des conditions de travail des agents (toujours plus de missions, toujours moins de moyens) et conscient de leur importance pour le gouvernement ont commencé à revendiquer toujours plus. De manière légitime une hausse des moyens et des salaires. Les syndicats les plus à droite, les plus factieux, eux, ont revendiqué beaucoup plus, des nouvelles lois, une certaines impunités policières. Castaner et maintenant Darmanin entendent bien satisfaire aux demandes de ces policiers. Peut-être aussi car la “sécurité” (quoi que l’on sous-entende par ce mot) est devenue la première préoccupation des français (la faute aux médias ?). La police durant cette mandature s’est droitisée et a pris une place importante dans le débat politique. Les lois de sécurité et d’anti-terrorisme, dont la loi “sécurité globale” survivront à Macron et pérennise un Etat de surveillance et de police qui devrait nous faire peur plus qu’il devrait nous “sécuriser”.

C’est oublié par beaucoup, mais en 2019–2020, nous avons connu le plus mouvement social en France sous la Ve République dû à la reforme du système de retraite. Les systèmes de retraite en France sont un héritage politique et syndicale majeurs du siècle dernier. Le système est imparfait car ne permet pas d’éliminer complètement la pauvreté arrivé à l’âge de le retraite, pour autant, le système est emprunt d’un esprit communiste de “cotisation, répartition, co-gestion”. Le néoliberal Macron n’a pas voulu s’attaquer à la pauvreté ou la complexité, mais bien à cet esprit communiste qui gère 200Mad€ de cotisations, qu’il serait bon pour lui de placer dans des fonds de pension. La lutte politique et syndicale a été rude, mais le système est imperméable aux revendications du peuple de ceux qui travaillent. Encore une facture entre un peuple et ses dirigeants. Le réforme a été voté sans difficulté dans l’entre-soi des ors du palais Bourbon, il aura fallu une “gripette” pour mettre en pause cette reforme.

Leur dernier grand évènement politique à prendre en compte pour les élections legislatives et présidentielles est bien entendu, la crise du COVID. Cette crise est loin d’être terminée, il est même probable qu’elle ne soit pas terminée au moment des votes. Cette crise n’a pas encore livré tout ces enseignements. Mais il est clair qu’elle remet en cause ou met en avant de nombreux problèmes de notre société. 1) Les pandémies mondiales sont un futur possible accentué par la pression sur les écosystèmes et la mondialisation des flux; 2) Notre système productif n’est pas résilient à l’arrêt des flux ou à des tensions sur les approvisionnements; 3) L’économie capitaliste ne peut pas assurer la rentabilité du capital et le maintien de la production sans aides non-conditionnée de l’Etat; 4) En cas de crise systémique, les droits des travailleurs sont remis en cause; 5) Les travailleurs de “première ligne” sont ceux dont le travail est le moins bien rémunéré et/ou dont les conditions de travail sont les plus difficiles et/ou les moins bien considérés par nos gouvernants; 6) Le système de santé français, parmi les meilleurs du monde dans le passé est dépassé et ne tient que grâce à des soignants dévoué; 7) Le ministère de l’éducation français n’a jamais su faire face à la situation de l’école à distance par un manque de préparation et un manque de moyen important. Cette situation a conduit le ministère à garder les écoles ouvertes malgré le risque pour les familles et les enseignants; 8) Les libertés les plus fondamentales comme celle de se déplacer librement, de manifester ou de se réunir peuvent être remise en cause très rapidement et pour un période indéterminée; 9) La démocratie parlementaire n’est ni efficace pour contrôler le pouvoir exécutif ni efficace pour impliquer la population dans la décision. Preuve que l’Assemblée Nationale n’a aucune utilité réelle sous la Ve République (dans la cas d’une super-majorité disciplinée); 10) Les médias n’ont pas fait leur travail d’information objectif et ont préféré le sensationnel, la petite polémique et la peur permanente.

# Contexte politique à gauche

Je suis intimement persuadé, qu’à gauche, il y a des réponses à ces points. D’ailleurs, plusieurs organisations politiques, syndicales et associatifs ont proposé des programmes et des plans après le premier confinement de 2020 (cf. plan de sortie de crise “plus jamais ça”). Il est évident que le thème principale des élections sera la crise du Covid et ces enseignements (à part si les médias ou le gouvernement décident que le thème principale soit la sécurité). Le gouvernement va devoir répondre de ces décisions, économiques, sanitaires, politiques. Les oppositions vont proposer leur vision du problème, conditionné par leur idéologie.

La gauche est le camp qui défend le parti des dominés (idée simplificatrice si l’on compare avec les ecrits d’E. Todd par exemple). La gauche électorale française est composée de diverse familles qui chacune à leur degrés prennent défense d’un camp. 1) Le Parti Socialiste actuel est un parti social-libéral avec des tendances ecologistes et social-democrates. Sa base électorale est surtout composée de fonctionnaires, de professeurs et autre profession intellectuel; 2) Europe Ecologie Les Verts est un parti écologiste où 2 tendances coexistent, une social-democrate voir social-libertaire (Piolles) et une social-libérale (Jadot). Contrairement aux partis verts belges et suisses, ces 2 tendances coexistent. L’électorat est surtout urbain, jeune, féminin et éduqué; 3) la France Insoumise est un mouvement politique, qui comme En Marche existe avant tout pour soutenir son leader, respectivement Jean-Luc Mélenchon et Macron. Ce mouvement prend la suite du Front de Gauche de 2012 et du Parti de Gauche de 2008. Les tendances à la France Insoumise sont diverses, avec des militants issus de traditions politiques différentes mais rassemblés autour d’un programme, celui de l’Avenir En Commun. C’est un programme d’inspiration eco-socialiste qui appelle notamment à la révolution citoyenne, ce qui le différencie du PS et d’EELV. L’électorat de Mélenchon en 2017 est la plus divers (cf. Todd) avec des ouvriers, des professeurs, des intellectuelles, des jeunes, fonctionnaires, des entrepreneurs; Je n’évoque pas les autres partis à gauche (du Parti Radical de Gauche au Nouveau Parti Anticapitalisme) car soit ils ne sont pas candidat à une union avec le Parti Communiste soit ils n’ont pas un poids électorale par rapport aux partis presentés.

Depuis 2016, le paysage politique à gauche a bien changé. Le Parti Socialiste, ultra-dominant à gauche s’est complètement effondré (la vente du siège historique de la rue de Solférino pour un siège 20 fois plus petit à Ivry en est un symbole). Le mandat catastrophique de Hollande est sûrement le déclencheur de la grande recomposition encore en cours à gauche. Une bonne partie de l’électorat socialiste a rejoint Macron en 2017 (les ministres actuels ex-socialiste en sont la preuve), une autre partie, déçue du bilan écologiste de l’ancien président a rejoint EELV en 2019 (élection européenne) et en 2020 (élections municipales). Pour autant, il ne faudrait pas croire que le parti socialiste ait complètement disparu. Il existe encore une base militante importante (bien plus grande que celle du parti présidentielle) mais surtout, tout un réseau d’élus et de petits notables dans les villes, les départements et les régions. Les municipales de 2020 ont confirmé (dans un contexte exceptionnel) l’implantation locale du PS. Mais ces élections ont aussi montré l’émergence d’EELV dans les grandes villes. Comme en Allemagne avec les Grünen ou encore aux Pays-Bas avec les Groen, l’électorat vert a évolué ces dernières années en incorporant l’ancien électorat social-democrate des centre villes. Todd (cf. “Les luttes de classes en France au XXIe siècle”) a montré dans ces études que le vote Vert est avant tout un vote de petit-bourgeois, déçu par Macron et Hollande, en attente d’une alternative politique désirable qui ne soit ni populiste ni anti-libérale. Si la tendance se confirme comme dans d’autres démocraties occidentales, le parti se scindera en 2, entre sa tendance social-democrate et sa tendance libéral, puis la tendance libérale prendra le pas sur le PS jusqu’à devenir “l’alternative” à la droite parlementaire classique. Cette option n’est pas à rejeter quand on voit le délaissement par Macron de cet électorat potentiel “Vert libérale” pour un électorat de droite démocrate-chrétienne.

L’autre grand bouleversement à gauche est sans nul doute le remplacement du Parti Communiste comme grand parti de la gauche socialiste par la France Insoumise. Pour être exact, ce surpassement du PCF par la FI ne l’est que dans les instances représentatives nationales (Assemblée Nationale, Parlement européen) et dans les médias. Le PCF peut encore se targuer 1) d’avoir une base militante importante (dans les premières de France), répartie sur tout le territoire; 2) des élus à tous les échelons, surtout au niveau local; 3) une organisation efficace et démocratique, permettant au parti d’exister sans un “leader”; 4) des intellectuels et savant qui produisent des arguments et des idées. En attendant, il ne faut pas ignorer la puissance médiatique et la qualité du programme de Jean-Luc Mélenchon. Il est aux yeux des médias et de la population, le plus légitime à la gauche du parti socialiste pour accéder à la présidence. Son score de 7M de voix en 2017 (avec le soutient du PCF) suivi des législatives démontrent sa légitimité individuelle. Les élections intermédiaires, Européennes et Municipales ont montré que le mouvement FI repose sur la personne de Jean-Luc Mélenchon. Il ne faut pas non plus sous-estimé l’importance du programme, “l’avenir en commun” dont les bases eco-socialistes, la cohérence et la co-rédaction constitue un nouveau ralliement pour bon nombre d’ancien citoyen perdu dans l’abstention ou le vote fluctuant. Contrairement à Macron, le candidat “sans programme”, le programme de AEC n’a pas besoin de Mélenchon pour que sa vision de la société vive et peut être porté par n’importe quel insoumis. La force de Mélenchon est son habileté oratoire, son expérience politique et sa réflexion évidente des enjeux contemporain.

J’ai bien différencié les 2 groupes qui est un clivage important à gauche. J’ai fait ce clivage sur le positionnement idéologique affiché de ces partis. J’aurais pu le faire sur la base de l’électorat visé, de positions sur les sujets économiques et sociaux, ou sur le rapport aux institutions. On aurait retrouvé ces 2 gauches. Mais sont-elles irréconciliable comme le suggérais Valls, ex-premier ministre de Hollande ?

Usul, chroniqueur sur mediapart a fait une très bonne vidéo où il essaie de répondre à cette question. Sa conclusion est que l’union de la gauche ne pourra se faire que sur une opposition franche au recul des libertés publiques, au recul des droits des minorités et sur un combat offensif contre l’extrême-droite.

Mais une question qui semble se poser avec celle du rassemblement de la gauche est celle du rassemblement de gauche anti-libérale, la gauche qui n’a aucune ambiguïtés avec la politique anti-sociale et autoritaire de Macron.

Nous avons 2 élections différentes en 2022 dont le résultat dessinent la vie politique française pour 5 ans (par le fait de la Ve république et du quinquennat). La première, présidentielle, est surtout une bataille de personne au niveau nationale où prime le discours médiatique sur le fond des idées. Le résultat de cette première élection conditionne presque directement le résultat des secondes, les législatives. Les députés ont un mode d’élection assez particulier puisqu’ils sont élus individuellement à un niveau local mais avec le soutien du président élu. Donc ils sont élus sous divers conditions où s’entremêlent local, national et individualité. L’élection reines est la présidentielle. Mais historiquement, la gauche, empreint d’une culture parlementaire, a su se rassembler et travailler pour les législatives. L’élection présidentielle individualisé favorisant le “chef” charismatique favorise donc les partis plus conservateurs.

# Contexte et historique du PCF pour les présidentielles

La question que pose ce vote des communistes est celui de la candidature commune de la gauche anti-Macron. Mélenchon ayant déjà annoncé sa candidature ferme, il ne reste au Parti Communiste de se rallier ou non à cette candidature. Beaucoup de point d’accord sont possible. D’autant plus que le programme de l’Avenir en Commun est pour une bonne part, une mise à jour du programme du Front de Gauche, co-écrit avec les communistes pour l’élection de 2012. Mais d’abord, un historique électorale du parti communiste, l’ouvrage, très complet de Julien Mischi, “Le parti des communistes” nous éclaire notamment sur le rapport des communistes à l’élection présidentielle.

Résultats à l’élection présidentielle pour les candidats communistes (wikipedia.fr)

La dernière participation directe à cette élection a été avec la candidate Marie-George Buffet (toujours députée) en 2007. A cette époque, Mélenchon était encore sénateur socialiste, et le PS était représenté par la droitière S. Royal. Le NPA avec Olivier Besancenot, le médiatique facteur des postes faisait 4% et 1.4M de voix. Entre le NPA gauchiste et le PS déjà jouant au centre, Buffet n’avait pas de concurrence à gauche. Pourtant, elle termina 7e en réalisant le pire score de l’histoire du parti à moins de 2%. Le contexte était différent, avant la grande crise du capitalisme et dans un contexte sécuritaire après les émeutes de 2005. Mais tout de même, la voix des communistes n’a pas porté dans l’opinion.

Il est connu que le parti communiste français, comme ceux des autres parti européen traverse une crise existentielle depuis la fin des années 80, d’où l’effondrement du nombre de voix. Mais comme l’a montré Mélenchon en 2012 puis en 2017, parler de répartition des richesses, de planification de l’économie, de démocratie, peut engranger des voix dans les classes populaire et moyenne. Nous devons donc être selon moi être critique de la stratégie électorale des candidats PCF de 1995, 2002 et 2007.

En 2012, le PCF est partie prenante du Front de Gauche, lancé par Mélenchon en 2008 après son départ du PS. C’est dans ce contexte de convergence vers un programme commun que le PCF de P. Laurent, le parti de gauche de Mélenchon et d’autres parti de gauche annonce une candidature commune autour d’un programme “populaire et partagé”. Ce rassemblement à gauche est approuvé par une consultation interne avec 59% des voix contre 37% pour une candidature d’A. Chassaigne (toujours député). Cette candidature commune fût d’un succès relatif avec 11% des voix et 4M de voix pour Mélenchon, le meilleur score pour la gauche depuis G. Marchais en 1981.

Pour 2017, Mélenchon lance une nouvelle plateforme électorale, la France Insoumise pour notamment intégré des associations et se détacher du “parti”. Sûrement car le mot “parti” a aujourd’hui une très mauvaise image auprès des français (la faute de qui ?). Entre 2012 et 2017, de nombreuses tensions entre le PG et le PCF sont apparus, surtout pour des questions de stratégies électorales lors des régionales et des municipales. C’est dans ce contexte que la commission nationale (dirigeants élus du parti) votent à 55% pour une candidature communiste autonome. Les militants communistes eux choisissent de rejoindre Mélenchon à une courte majorité, 53.50%. Contrairement à 2012, cette fois-ci, le parti communiste n’a pas eu l’opportunité de rédigé le programme puisque déjà rédigé et validé par les insoumis. L’histoire, on la connait, Mélenchon engrange 7M de voix, le meilleur score pour un candidat de la gauche radicale pour n’importe quelle élection dans l’histoire de France. Les divergences de vues concernant les législatives vont finir de faire monter les tensions entre PCF et FI. Par exemple, Le PCF voulait s’allier localement avec le PS ou EELV alors que la FI voulait avoir une ligne clair “anti-PS” auprès de ces électeurs. Probablement pour ne pas avoir affaire avec des députés sortant de la législature Hollande.

Le XXXVIIIe congrès du parti d’Octobre 2018 d’est vu s’affronter les 3 stratégies que peut prendre le parti. Continuer à soutenir le front de gauche et rassembler à gauche (Option du CN), s’engager plus fermement avec la France Insoumise (alternative 1) ou alternative 2 visant à réaffirmer l’identité communiste et se distancier de la FI. A la suite de débats important pour l’avenir du parti, et pour la première fois en 100ans, la direction est mise en minorité, ne recueillant que 38% des suffrages contre 42% pour l’alternative 2 de Roussel et Chassaigne. La conséquence immédiate est la désignation de Fabien Roussel comme secrétaire nationale, la conséquence importante selon moi, est la fin du front de gauche et l’autonomisation du parti. Autonomisation nécessaire pour des choix politiques pragmatiques au niveau local, de temps en temps seul, de temps en temps avec les socialistes, de temps en temps avec les insoumis.

# Les 2 options qui s’offrent aux communistes

Pour 2022, 2 options sont proposés aux communistes par la conférence nationale.

La première, émane de la direction (66% des délégués) élue de 2018 et la seconde de camarade pour un rassemblement large.

## Option 1 : Une candidature communiste
à la présidentielle, utile pour transformer la France et reconstruire la gauche

S’agissant de l’élection présidentielle de 2022, son 38e Congrès avait fixé au PCF le mandat de travailler à créer les conditions d’une candidature communiste.

Le préambule nous rappelle que cette option correspond à la position de la majorité des délégués du congrès de 2018

Pour créer les conditions d’une alternative de gauche s’appuyant sur le mouvement populaire, parce qu’il y a plus que jamais besoin d’espoir, le rôle du PCF est décisif.

Historiquement, le rôle du PCF est décisif à gauche, de part sa base militante, son histoire, son programme,… La question que l’on peut se poser est celle du “mouvement populaire”. Avec un affaiblissement des effectifs des syndicats et des sections, le parti va devoir se réinventer pour retrouver ce lien avec le mouvement populaire.

Ensemble, donnons-nous les moyens d’en finir réellement avec la pandémie et d’engager une rupture avec les logiques capitalistes qui ont mené notre pays et le monde à une impasse. […] conquérir une vie digne et émancipée, donner un nouveau sens au travail, à l’entreprise et à la vie sociale, réussir la transition sociale et écologique. L’heure est à construire ensemble et à faire progresser des idées révolutionnaires

Les mots sont lâchés, “rupture avec le capitalisme” et “révolutionnaires”. On parle de sens au travail, de vie sociale, de transition écologique. Comme le dit Lordon, il faut construire un communisme “désirable”. La crise à montré les limites du capitalisme “désirable”, ici, on retrouve cette désirabilité de la vie via une alternative communiste. Cette recherche de désirabilité est confirmé avec

Faire du vaccin un bien public mondial ou pour développer des solidarités concrètes, à travers nos propositions pour éradiquer le chômage et la précarité ou pour sécuriser l’emploi et la formation, dans les actions pour la justice climatique et environnementale, dans les innombrables batailles pour gagner l’égalité réelle contre le patriarcat, le racisme et toutes les dominations.

La majorité des français veulent un vaccin pour tous, une éradication du chômage et de la précarité. Faire la transition écologique “avec” et pas “contre”.

Nous décidons de proposer à notre peuple une candidature communiste.[…] Il s’agit également de proposer une nouvelle offre politique, d’enclencher une véritable dynamique de changement à partir de l’élection présidentielle, de favoriser ce faisant le rassemblement autour d’une perspective de transformation de la société.

La stratégie proposée ici, est celle d’une candidature fermement communiste mais rassemblant le peuple plutôt que des étiquettes. Il s’agit d’une stratégie proche de celle de Mélenchon à la différence que Mélenchon ne se réclame pas ouvertement d’une étiquette, mais d’un programme.

Les communistes ont toujours combattu la Ve République et ses dérives, fonctionnant telle une monarchie présidentielle. Ils se battent pour une démocratie représentative et citoyenne. C’est leur projet pour une nouvelle République.

Depuis 1958, le parti communiste combat la constitution de la Ve république. Avec cette proposition d’une 6e république, on s’inscrit dans une continuité historique et dans un constat partagé partout à gauche.

L’élection de député·e·s communistes et d’une majorité de gauche sera un important point d’appui pour la mise en œuvre d’une politique de réelle transformation sociale. […] Elles et ils proposent dès lors que se construise avec toutes les forces de gauche et écologistes, en lien avec le mouvement populaire, et sur la base du débat que nous mènerons à la présidentielle à partir de notre projet avec ses mesures précises remettant en cause les logiques capitalistes, un pacte d’engagements communs.

La constitution d’une majorité aux législatives est un point important de cette stratégie. Une présidentielle avec un candidat communiste pour exister et un rassemblement d’une gauche “plurielle” pour les législatives. Historiquement, la gauche plurielle de 1997–2002 est un bel exemple d’avancées sociales concrètes (35h,…) quand la gauche se rassemble.

Tout au long de l’année à venir, le Parti communiste français prendra des initiatives en ce sens. Nous voulons avancer vers un socle commun fait d’idées nouvelles, s’appuyant sur les luttes du monde du travail et de la culture, de la jeunesse, des mouvements sociaux, féministes, écologistes, antiracistes, démocratiques.

L’appui sur les luttes sociales peut être une solution pour connecter le peuple avec la politique nationale via le parti. Ce lien mouvement social/politique nationale via des députés communistes à l’image de la population a été porteur de résultats pour le progrès dans les années 50 et 80.

Se fondant sur l’irruption citoyenne et démocratique, les communistes entendent œuvrer à construire de nouveaux rapports de force politiques et sociaux où l’humain et la planète seront pleinement respectés.

Avec une prise en compte du fait politique de la révolution citoyenne comme moteur du mouvement social, Gilets Jaunes, Black Lives Matter stop loi globale,…

Si je devais donner une inquiétude face à cette proposition est le manque d’un programme “clair” dans le sens où le programme de Mélenchon est prêt et solide pour 2022. Le plan communiste de transformation qui doit être présenté pour 2022 est encore à écrire. Il ne faudra pas selon moi donner l’impression d’un programme à “tirets” qui ressemblerait à n’importe autre programme tiède, plein de promesses…

## Option 2 : Alternative

La colère monte dans le pays contre les politiques libérales et les luttes se multiplient dans maints domaines : […] Ensemble, ces mouvements dessinent un autre horizon politique, une perspective d’espoir. […] Aujourd’hui, la division des forces de gauche et de l’écologie, leur incapacité à converger avec les forces sociales et citoyennes pour élaborer un projet porteur d’espoir, risque de conduire au scénario catastrophe

Le constat est le suivant, le rassemblement de la gauche des luttes sociales doit se rassembler au risque de décevoir et de permettre au fascisme et au néolibéralisme de gagner.

Du reste, fait inédit dans l’histoire du pays, l’extrême-droite semble désormais en capacité de profiter du rejet massifdes politiques libérales pour espérer l’emporter. Dans cette situation inédite, les communistes doivent être, à nouveau, au rendez-vous de l’histoire.

Contrairement à la stratégie 1 qui croit en un vote “pour”, les signataires de l’alternative croit en un vote “contre” le pire. Et pour faire gagner ce vote contre le pire, il faut est rassembler, jusqu’à faire appel à l’histoire (probablement à 1936 avec le front populaire contre les ligues fascistes).

Nous nous proposons d’interpeller et de rencontrer forces de gauche et acteurs du mouvement social pour construire une stratégie partagée dans la clarté d’un projet de rupture. […] mener ce débat au grand jour avec l’objectif que le peuple s’en mêle car le seul dialogue entre forces politiques n’y suffira pas.

Mélenchon a la même rhétorique contre la “tambouille” électorale et pour un rassemblement de clarté autour d’un programme. Derrière le programme de la France Insoumise ?

Construire ensemble un pacte d’engagement commun à l’ensemble de ces forces, autour de : 10 mesures [sociales, écologistes et démocratiques] majeures. […] Une majorité parlementaire respectueuse de la diversité de la gauche et du mouvement social […] sur la base de cette démarche partagée, convenir du nom qui figurera sur le bulletin de vote à la présidentielle, avec au cœur de notre projet l’engagement d’un changement de régime.

Pour remettre un peu de contexte, ce texte est porté par des camarades pour une poursuite du rassemblement avec Mélenchon. Les mesures sont peu ou prou les points du programme de l’AEC et peu de chance que Mélenchon accepte un autre nom que le sien sur le bulletin de vote.

# Que Faire ?

La première proposition est dans la continuité du vote de 2018 et cherche à proposer une candidature purement communiste pour 2022. Cette candidature chercherait un vote “pour” de la part d’un socle de citoyen le plus large possible, en alternative avec Mélenchon ou le PS tout en appelant au rassemblement au législative. Pour ces camarades, il faut remettre le mot de “communiste” dans le paysage politique des français.

La seconde proposition met en avant la gravité de la situation en France qui appelle à un rassemblement rapide de la gauche (comme l’explique Mélenchon dans son appel aux communistes). Pour ces camarades, le rassemblement de la gauche anti-Macron et anti-LePen est une nécessité face à l’histoire, quitte à remettre en cause la survie médiatique à court terme du parti des communistes.

Mon avis personnel : Je n’ai pas encore tranché sur la stratégie à tenir. D’un côté, je comprends et je souhaite voir le Parti Communiste, le parti de 100 ans poursuivre une lutte historique en son propre nom. Pour autant, je dois reconnaître que les statistiques du passé et la menace fasciste nous amène à prendre une décision avec gravité pour éviter le pire face à l’Histoire.

EDIT : J’ai finalement voté pour une candidature autonome, mais pas pour une candidature du camarade Roussel. Le début de campagne sur la sécurité me donnant raison. La suite de ma réflexion, est à retrouver dans cet autre article où je me pose la question de la stratégie à gauche.

— OdM, militant communiste, Mai-2021.

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Octavien de Mehun

Chercheur et Communiste. Sujets d’études: Réseaux informatiques, Philosophie onthologique et Politique, Linguistique, Physique théorique, Architecture.