Dans le monde d’après, les couloirs vides

Octavien de Mehun
2 min readOct 30, 2021

Après les couvre-feux et les restrictions sanitaires nous devions tous nous retrouver au bureau. Reprendre nos bonnes vieilles habitudes. Pause café, déjeuner, bureau partagé. Mais finalement, après des mois de reprise en régime “normal”, en arrivant à 8h, je ne croise plus personne dans les longs couloirs qui me mène à mon bureau. Certains diront que c’est un peu tôt pour croiser les cadres qui commencent plus régulièrement à 9h voir 9h30. C’est vrai, mais la table de la pause café reste globalement vide à 10h. Ah oui, mais il y a Jean, il a une conf-call, il a préférer rester chez lui pour y participer dans le calme. Ah, et il y a Corinne, c’est son jour de télétravail. Et puis Nicolas, et bien lui, on ne sait pas trop dire, il a sûrement préféré rester chez lui vu le temps, il vient à vélo d’habitude. Bref, beaucoup ont apprécié le télétravail et le reconduisent autant que possible, 3 jours par semaine si possible. Pour d’autres, on préfère venir que le matin ou que l’après-midi ou bien, on préfère manger à la maison.
Pour tous, il n’y a plus de synchronisité pour venir régulièrement. Du coup, les équipes sont vides de 30 à 50%, comme un mois d’Août qui se poursuivrait jusqu’à l’automne et sûrement plus longtemps. 30% suffit à donner ce sentiment de vide, de découragement, d’apathie généralisée. Moi qui préfère les réunions informelles et un bureau dédié au travail sur mon lieu de travail, je ne revoie plus certains collègues avec qui pourtant les discussions étaient intéressantes. Non, je ne vais pas ennuyer mes collègues avec une conf-call de plus pour parler de je ne sais quoi, le propre des discussions informelles qui sont centrales dans la recherche.
Conclusion, je ne parle plus avec personne, les habitudes sont perdus et certains sujets n’avancent plus. C’est bien, je suis sûr qu’individuellement mes collègues qui préfèrent rester à la maison travaillent mieux avec un meilleur équilibre vie pro / vie perso et je suis même sûr qu’ils apprécient de pouvoir glander sans avoir le regard des autres qui pèsent sur eux. Mais pour le collectif, le télétravail partiel, c’est l’atomisation finale du groupe de travailleur, la dernière précarisation, la dernière individualisation qui est tellement importante pour un marché du travail fluide et efficient.

--

--

Octavien de Mehun

Chercheur et Communiste. Sujets d’études: Réseaux informatiques, Philosophie onthologique et Politique, Linguistique, Physique théorique, Architecture.